interviou

petite flemme

 

 

– Tu écris en ce moment ?

– Pas plus que ça

– Pourquoi donc ?

– Il faudrait que ce soit absolument nécessaire…

– C’est redondant ce que tu dis, là

– Tu vois bien !

– Ne cède pas à la facilité, veux-tu. Argumente, nécessaire comme quoi ?

– Comme l’air, comme le ciel, comme… le viognier !

 

                                                   modèle : Odette

 

le vrai de la chose (pour Agathe)

 

 

Hey, Mesdemoiselles !

Madame ?

Hey, toi !

C’est à moi que tu causes, touriste ?

Si tu me coupais pas les palmes, ce serait mieux

Ben voilà, c’est mieux

– Que veux-tu savoir, touriste ?

– Ben, pourquoi vous faites toujours la gueule ?

– Mais tu ne comprends rien à rien, touriste,

on fait pas la gueule, nous autres,

c’est juste que…

– Que quoi ?

Nous sommes les mal-aimées,

voilà le vrai de la chose

(mes palmes, touristes, mes palmes…)

Le 22 septembre 2014 exactement, j’étais allée chez Nakagawa-sensei avec une vieille caméra à cassette. De retour à Paris, commencé un premier montage. Resté tel quel.
Il faudra le refaire, gommer la voix de l’interviouveuse, hausser un peu celle de Nakagawa, ajuster les couacs des raccords musique. Du boulot ! Et nul matériel pour l’exécuter, à cette heure. Dans l’urgence, j’envoie tout de même le film, tel quel.

Musique  Pierre Ferragut

pays de neige

 

Vrai, c’est le printemps. Tous les signes sont là. Calendrier et météo se sont donné le mot. Voudras-tu bien me dire pourquoi, dans certain quartier, c’est encore l’hiver, avec la neige qu’on n’a pas eue, qui est déjà partie.

 

 

sayonara, Hodie

plus d’interviou*, promis.

*https://ifnothinghappens.com/2015/04/

interviou de Wilfried* (part 3)

 

Où l’on apprend que Wilfried* aimerait bien faire ça aussi 

Quand je lui demande si ce qu’il fait n’est pas de la poésie, il répond que non car ses textes sont chantés.

– Qu’est-ce que tu écris, en ce moment, si ce n’est pas de la poésie ?

– Autre chose, une sorte de roman que je mets du temps à finir. Par ailleurs, je suis journaliste. Les autres sont musiciens, moi c’est mon métier. C’est mon activité principale.

– Voilà pourquoi tu connais tout ce qui se passe, tu es à l’écoute. Et puis tu passes de la musique pour faire danser les autres. C’est important la danse ? Tu es danseur ?

– Oui, dans le sens où j’aime bien danser dans des clubs. Danser sur la musique, dans un cadre festif avec l’ivresse, la drogue…(rires) J’aime bien être traversé par le son, sentir que ça met en mouvement le corps, que chaque fréquence peut être décomposée, j’aime l’effet que peut avoir une ligne de basse sur les jambes, le ventre, et une envolée de violon sur la tête ou les mains, on est vraiment, comme ça, entre les fréquences basses, medium ou aiguës ou autres… c’est physique. Ça donne un rapport quasi synesthésique avec la musique…

– Ça me rappelle ce film où des sourds dansaient sans entendre la musique mais en percevant les fréquences, les vibrations (Au pays des sourds, de Nicolas Philibert)

– Oui, il a aussi fait La moindre des choses, sur la clinique de La Borde…

Il évoque alors Marie Depussé, Dieu gît dans les détails. De mon côté, mon amie photographe, Naoko Tamura, qui a choisi ses plus belles photos de La Borde pour en faire Une forêt en Sologne. Je me rappelle soudain une chanson de Wilfried* qui s’appelle Je suis fou mais ne le dis pas. Puis nous reprenons le fil – un fil.

matrice

– Alors, ton roman ?

– C’est sur Paris en fait. Comme c’est mon nom de famille, c’est une dérive psycho-géographique dans Paris avec des associations, des correspondances… Il y a 20 chapitres, plus un vingt-et-unième, un arrondissement imaginaire.

– Je croyais que c’était  Montreuil, le vingt-et-unième ?

– Il y en a qui disent que c’est Deauville ! (rires) Enfin, l’idée, c’est de sortir, de quitter Paris. Ça prend du temps… À un moment, j’avais envie de le faire publier comme un texte qui ne serait pas fini, avec cette idée que je continuerais à l’alimenter régulièrement… montrer un processus d’écriture. Même pour les chansons, j’ai toujours eu envie que les gens voient les différentes étapes de leur construction. J’aimerais mettre la première version, puis le squelette et qu’on voie la chanson se construire. Pour un roman, j’aimerais bien faire ça aussi. Une sorte d’interface où l’on verrait les ratures, les réécritures, les corrections, les rajouts et du coup, ce serait un texte qui ne finirait pas, effectivement… J’essaie de trouver une solution de publication adaptée à cette ambition de ne jamais finir ce texte – ou de pouvoir toujours y revenir.

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Liens vers Wilfried*

https://www.facebook.com/wilfried.etoile

http://wilfried.bandcamp.com/

interviou de Wilfried* (part 2)

Où l’on apprend d’où vient l’argot

– Parle-nous de Patrice et Matrice. L’un a-t-il précédé l’autre ?

– C’était parallèle. J’avais des chansons en chantier depuis longtemps et du coup, je me suis obligé à achever deux chansons par mois, de janvier à septembre 2012. Donc, il y a eu Matrice, des chansons en français et puis Patrice, en anglais. Comme une gestation : une fille, un garçon. Et à la fin, ça a donné Matrice. Il n’y a pas nécessairement d’échos entre les deux. Ce sont deux entités distinctes. Et chaque chanson a un peu son histoire, plus ou moins longue.

– Quelle serait l’histoire de Matrice ? Ça m’avait un peu fait penser au Horla ?

– Pour MatriceLe Horla n’a pas influencé l’écriture. Plutôt Philip K Dick, d’abord, avec l’idée que quand on peut contrôler le sens des mots, on peut contrôler les gens qui sont obligés d’utiliser ces mots. La figure du double est présente, bien sûr, mais il s’agit plutôt d’une présence et d’une acceptation de l’autre, jusque dans sa plus grande étrangeté, un nazi, un extra-terrestre… L’idée de « matrice » réconcilie ces antagonismes, comme un sentiment océanique ou une nature bienveillante, mais elle peut prendre une dimension angoissante, la bienveillance devenant aliénation. C’est ma vision, parcellaire, de la chanson mais j’espère que chacun pourra y trouver son mystère propre…

 

matrice bleue

 

Histoire de La langue des oiseaux

La langue des oiseaux, qui est le titre d’une de mes chansons, est une langue secrète, ésotérique, une technique de cryptage et de décryptage du langage courant, fondée sur l’assonance, qui donne ou permet de trouver un sens caché à des phrases, des mots, à partir de leur dimension phonétique, par des procédés d’inversion (verlan), d’homophonies, de synonymies, d’anagrammes, par des jeux de mots… Ainsi, la phrase (un des exemples les plus connus) : « Voici un message secret disant les mots » peut être écrite « Vois si un mets sage se crée, dit sans les mots ». Et les lettres elles-mêmes sont symboliques, par exemple, le mot FORT peut être décomposé ainsi : F (feu) + O (eau) + R (air) + T (terre) = FORT. Et lorsqu’on enlève le T de Terre, il nous reste le « for » intérieur…

C’est une langue universelle, en quelque sorte, utilisée par les alchimistes, les cabalistes, et de nombreux écrivains (Rabelais, Swift, Cervantès, les poètes soufis persans) pour cacher des informations. On pense ainsi que l’argot a été inventé par les constructeurs de cathédrale, pour se transmettre leurs secrets de fabrication, puisqu’il y a une parfaite homophonie entre l’art gothique et l’argotique…

La chanson Au clair de la lune qui a inspiré ma chanson sur la langue des oiseaux, a un sous-texte que l’on peut réécrire ainsi :

Au clerc de la lune

Mon ami pie héraut

Prête mots à ta plume.

Pour écrire un mot :

Mâche chant d’ailes, et mots heurte.

Jeu n’est plus de feu,

Ouvre mots à ta porte.

Pour l’âme, hourde d’yeux.

 

Image

 

Ma chanson n’utilise pas explicitement la langue des oiseaux, mais elle l’évoque, elle tourne autour du premier couplet d’Au clair de la lune. C’est Eloïse Decazes, du groupe Arlt, qui devait la chanter au départ et c’est pour ça qu’elle est nommée dans la chanson. Et puis finalement, j’ai préféré ma version, plus lointaine. C’est aussi une manière (avec La revenante, qui est une chanson sur elle-même, une chanson sur la chanson) de parler de la dimension immatérielle, aérienne, spirituelle, de la musique, du chant.

 

Liens vers Wilfried* où l’on peut écouter plusieurs chansons de Matrice :

https://www.facebook.com/wilfried.etoile

http://wilfried.bandcamp.com/

interviou de Wilfried* (part 1)

Il faisait la première partie de Manuel Bienvenu à l’Espace  B, au printemps dernier. C’était beau. J’ai eu envie d’en savoir plus. D’où l’interviou.

 

Où l’on apprend que Wilfried* est un revenant

wil

– À 34 ans, à 34 ans seulement je découvre la seiche. Je l’adopte et j’ai cru comprendre, après des heures et des heures de station devant elles qu’elles aussi m’adoptaient, écrit Michaux à Supervielle. Un commentaire ?

– Ça me fait penser à un autre poète que j’aime bien, Francis Ponge, qui a écrit Notes pour un coquillage. En l’occurrence, le coquillage ne l’a pas adopté mais cette idée d’une maison, d’une habitation qui soit à la mesure de l’homme… Il parle des églises, il dit qu’elles sont immenses, qu’elles écrasent l’homme. Les hommes sont des fourmis au milieu des églises et il aimerait que leurs demeures épousent leur corps, soient à leur mesure, à leur taille, qu’ils puissent glisser à l’intérieur et qu’elles soient très proches de leur peau. Donc, il parle des coquillages…

– Michaux a découvert la seiche. Pour toi, qu’est-ce que ça pourrait être ?

– Il y a des découvertes tardives… Ce qui pourrait être marquant pour moi, sans doute, les textes gnostiques, j’ai beaucoup lu de textes religieux, même la Bible tout simplement…

– D’où vient Tonnerre, intellect parfait, justement ?

– De codex retrouvés en 1945 en Égypte. Ça s’appelle la bibliothèque de Nag Hammadi. Ce sont des papyrus qui regroupent les derniers témoignages de groupes religieux considérés comme des sectes, comme hérétiques par l’Église. C’étaient des disciples de Jésus qui avaient d’autres conceptions, cosmogoniques, un peu révolutionnaires à l’époque… Le monde était une espèce d’illusion entretenue par un démiurge, un démiurge fou en fait… et c’était par la connaissance qu’on pouvait sortir de ce monde.

Ça me semblait important que ce soit dit par une femme. C’est un personnage féminin. Ça allait bien avec l’album Matrice – ceci dit, Matrice, c’est aussi le titre d’un album qui préexistait, c’est Gérard Manset qui avait fait Matrice dans les années 80. Voilà, c’est une femme, c’est une déesse, c’est une sorte d’incarnation du Saint-Esprit avec sa dualité, son ambivalence, elle est une chose et son contraire en même temps, c’est ça qui m’intéressait…

– Ce qu’on retrouve beaucoup dans tes textes

– L’ambivalence, oui, le paradoxe, l’ambiguïté, la dualité même, ça m’intéresse effectivement.

– Il y a d’ailleurs dans Matrice un duo avec Chloé Delaume

– Chloé ? On se connaît depuis longtemps, depuis une dizaine d’années, on a fait des fêtes ensemble, on a des amis en commun, enfin voilà, on se connaît. Et elle avait ce texte inspiré par la série américaine Dexter et du coup, elle voulait une musique un peu lewiscarrollienne, un peu rétro comme ça, onirique… un peu comme un vieux film aussi… anglais… Elle avait la mélodie, les paroles, après, moi j’ai fait la deuxième voix. Je trouvais que ça rentrait bien dans le cadre du disque en fait, même si j’avais un peu de mal avec le texte qui est assez violent, c’est quand même une femme qui dévore un homme et lui, il se laisse dévorer…

– C’est vrai mais avec la musique, c’est très… acceptable ! (rires)

– Oui ? Après, j’ai réussi à mettre La Revenante. Finalement, j’étais content de mon tracklisting… C’est peut-être moi qui reviens dans La Revenante… Je me fais peut-être dévorer mais je reviens après donc je suis sauf !

double

liens vers Wilfried*

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