Mois: juillet 2014

encore

 

– On est le 1er août ?

– Non, c’est demain

Nori sourit.

– Ça te rend si joyeux qu’on soit encore en juillet ?

– Ben oui, on est encore en juillet, encore quelques heures…

 

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le marchand d’oublies

 

Le Marchand d’oublies. Sa boîte rouge (qu’il transporte sur le dos) et son tourniquet attirent des petites filles aux longs pantalons de dentelle, coiffées d’un béret écossais. Il est probable que lorsque la baleine s’arrête sur certains numéros, il offre beaucoup plus que de minces gaufrettes ; peut-être un sésame, un signe de ralliement.

Le marchand d’oublies porte toujours un masque et fréquente des Tuileries noires d’un accès difficile. Le terme qui désigne sa marchandise laisse rêveur, avec son e manifestement ajouté pour embrouiller les choses.

 

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André Hardellet, Les chasseurs

regarde

 

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J’aurais voulu être lui. Il se tenait là, agité et nonchalant à la fois, tournant autour de la barre, la cigarette sur l’oreille, comme tu vois. Une vraie dégaine. Pas grand, avec de belles oreilles, surtout celle à la cigarette. Mais si, regarde bien.  Je l’ai pris en photo en loucedé, c’est pour être raccord, il avait je te jure un côté Villon made in Hong Kong – Tony Leung à ses débuts, adorable petite frappe.

la liste disait

 

Ta sœur et toi aviez quatre ans d’écart. Elle était adolescente lorsque ta mère est morte. Elle était devenue la seule femme de la maison et avait décidé que c’était à elle de s’occuper de toi, elle voulait que tout soit comme avant. Une dizaine de jours après l’enterrement, elle t’avait dit : il va falloir qu’on s’organise sinon on ne va jamais s’en sortir. Tu avais fait oui de la tête sans comprendre, sans chercher à comprendre, ton père prenait soin de vous, vous n’étiez plus que trois mais les choses étaient  comme avant.  Sans en parler  à ton père,  elle  avait noté  sur une feuille de papier  en quoi  consistait  l’éducation  de votre mère et  s’était appliquée à suivre point par point ce que disait la liste. Un soir où je dormais chez toi, tu m’avais montré la feuille que tu avais trouvée en fouillant dans sa chambre. La liste disait :

  • vérifier qu’il fait ses devoirs
  • l’obliger à manger des légumes
  • le soir, aller l’embrasser dans son lit
  • vérifier qu’il ne fume pas en cachette
  • lui laisser regarder la télé le mardi soir et le samedi soir
  • l’obliger à sortir s’aérer dans le jardin le mercredi et le dimanche après-midi
  • vérifier qu’il change de slip (tous les jours) et de chaussettes (tous les trois jours)
  • très important : vérifier qu’il se lave tous les jours (et avec du savon)
  • l’inscrire à une activité sportive
  • aller à la bibliothèque avec lui tous les quinze jours
  • l’empêcher de ne porter que des baskets
  • lui offrir un paquet de vignettes Panini Foot 76 quand il a bien travaillé en classe
  • prévenir papa pour qu’il l’engueule quand il a mal travaillé en classe

 

Elle  y  avait  ajouté  sa touche personnelle,  c’était  à la fin de la liste et ça s’appelait « Touche personnelle » :

  • lui offrir un chien (mais c’est lui qui doit lui donner à manger et le sortir)
  • lui faire écouter Bowie
  • le dégourdir (lessive, cuisine, etc.)
  • inviter Franck à dormir à la maison une fois par semaine

 

Tu avais eu un chien pour tes onze ans, tu connaissais les chansons de Bowie par cœur et moi aussi par la même occasion, elle t’avait appris à faire les lessives de toute la famille avec tant de soin que tu aurais pu ouvrir une blanchisserie, je dormais chez vous tous les mardis soir.

 

Valérie Sigward, Markus presque mort

passé simple

Qui la refila à qui ?  On nous soigna en même temps,  pour faire plus simple,   mon cousin et moi,  qui nous retrouvâmes  donc dans la même chambre,  le même lit dans mon souvenir,  pendant plusieurs jours,  un mois dans mon souvenir,  à remplir  sans fin  des  coloriages    magiques, vraiment magiques, et à visionner au View-Master nos nouveaux disques en boucle, cadeaux dus à notre état ;   Peter Pan était notre préféré.   La rougeole, les plus belles vacances de ma vie.

 

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